Ce mardi 21 septembre à 10H15, l’association Alda s’est installée dans un appartement Airbnb qu’elle juge frauduleux, situé dans la villa « Ungui Ethorri » au 20, avenue de la République à Biarritz, à gauche de l’entrée du Parc Mazon. Une vingtaine de militants de l’association ont investi le logement, symbolique aux yeux d’Alda d’une « fraude massive, délibérée et pratiquée en toute impunité par les plateformes numériques de type Airbnb et Abritel en Pays Basque nord. Largement plus de 10 000 meublés touristiques violeraient ainsi la loi et feraient encourir à ces plateformes 80 millions d’amendes, si les collectivités locales les assignaient devant les tribunaux. De quoi construire plus de 500 logements sociaux !

Le studio est devenu une véritable fourmilière : murs couverts d’affiches pour le droit au logement, les activistes s’y relaient pour confectionner telle ou telle banderole, ou s’y fournir en tracts, autocollants ou brochures sur la crise du logement au Pays Basque. Ils ont accroché aux grilles de la villa une banderole clamant «Ici, Airbnb viole délibérément la loi. Etxebizitzak herritarrentzat! »  Une grande tente a été installée à l’extérieur arborant un panneau disant « Airbnb a le plaisir d’offrir cette magnifique résidence principale à la population locale…De rien, vraiment ! ». Les membres de l’association comptent rester au moins jusqu’à vendredi matin et appellent les sympathisants de l’action à venir les y rencontrer. Notamment les personnes voulant témoigner de leurs problèmes en matière de logement.

Airbnb viole délibérément la loi

L’appartement n’a pas été choisi au hasard. Logement loué à des locaux jusqu’à la fin 2020, c’est devenu en 2021 un meublé touristique permanent sur la plateforme Airbnb. Il est entièrement géré par la conciergerie Luckey, qui appartient à 100 % à Airbnb. Or, aucun numéro d’enregistrement n’apparaît dans son annonce ce qui est pourtant, suivant l’article L324-2-1 du code du tourisme une obligation légale passible d’une amende de 12 500 euros ! C’est Luckey qu a rédigé l’annonce en question et Airbnb n’a donc aucune excuse pour expliquer cette violation de la loi. Violation délibérée et massive aux yeux de l’association Alda, qui dénonce l’existence de 3600 logements entiers dans le même cas sur les 5600 que compte Biarritz. L’association estime que 2/3 des meublés touristiques proposés en Pays Basque nord ne sont même pas enregistrés et volent annuellement aux finances publiques 2 millions d’euros rien qu’au titre de la taxe de séjour.

Cela pourrait coûter cher à Airbnb

Si la volonté politique d’en finir avec une telle impunité était au rendez-vous, cela pourrait coûter cher aux plateformes numériques contrevenantes. En juin dernier, la ville de Paris a fait condamner la société Airbnb à 8000 euros d’amende par annonce sans numéro d’enregistrement. La mairie en avait recensé 1010 et va donc empocher plus de 8 millions d’euros.
Selon les estimations d’Alda, les annonces de meublés touristiques sans numéro d’enregistrement -et facilement identifiables- dépassent très largement les 10 000 en Pays Basque nord. C’est donc plus de 80 millions d’euros qui pourrait théoriquement être ainsi demandés aux plateformes internet telles qu’Airbnb, Abritel, Le Bon Coin etc. ce qui permettrait la production de 500 logements sociaux !

Interpellations publiques et rendez-vous divers

Ainize Butron, porte-parole de l’action, a demandé des comptes à Airbnb sur ces violations massives et délibérées de la loi. « Nous demandons également à la Ville de Biarritz de vérifier si ce logement satisfait à ses autres obligations : déclaration officielle, demande de changement d’usage, paiement de la taxe de séjour etc. Nous avions fait la même demande à la mairie de Bayonne suite à notre occupation d’un premier Airbnb au 14, rue des Tonneliers. Et bien, ce logement était en fraude à tous les niveaux et à reçu une mise en demeure de la ville. De tels propriétaires, qui privent la population locale de logements et assèchent les finances publiques, doivent être traînés au tribunal, où ils risquent pour de tels faits des sommes bien plus lourdes que les 12 500 euros encourus pour non publication de numéro d’enregistrement ! ».

La militante d’Alda a rappelé les 2 revendications de l’association adressées à la Communauté d’agglomération du Pays Basque, à savoir la généralisation de la demande d’autorisation de changement d’usage aux personnes morales et la mesure de compensation. Elle a invité la population à soutenir ces 2 propositions pouvant porter un coup d’arrêt à la prolifération du phénomène Airbnb en signant la pétition Se loger pas spéculer sur www.alda.eus/logement et en passant visiter le nouveau QG de cette campagne installé à côté du Parc Mazon à Biarritz. Un apéro tapas y est prévu ce mardi à 18H30, et les ceux qui soutiennent cette action sont invités à y passer. Alda invite la population à participer massivement à la grande manifestation unitaire pour défendre le logement pour toutes et tous, organisée à Bayonne le samedi 20 novembre à 15H00. « Nous devons être des milliers pour demander aux élus et responsables divers de prendre immédiatement des mesures fortes et contraignantes pour limiter cette crise qui devient ingérable autant qu’insupportable » a déclaré Ainize Butron.

La crise du logement sur Biarritz en quelques chiffres :

L’association Alda a profité de cette nouvelle action pour faire part à la presse de chiffres et de tendances préoccupantes, concernant la crise du logement à Biarritz.
En 2018, il y avait plus de logements (25 892) que d’habitants sur cette commune (25 532) ou pourtant de plus en plus de Biarrots n’arrivent plus à se loger ! Alors que la ville a énormément construit entre 2008 et 2018 (+ 1865 logements supplémentaires), le parc locatif privé a baissé ! (-518 logements soit -10 %). Toujours en 2018, il y avait plus de 40 % de résidences secondaires à Biarritz.
Pas moins de 5 600 logements entiers sont aujourd’hui loués à Biarritz sur les plateformes de type Airbnb, Abritel, Le Bon Coin etc. dont seulement 2000 environ sont enregistrés. Parmi eux, il y a 1583 logements entiers loués toute l’année comme meublés touristiques, donc enlevés à la population locale. Énorme, quand on sait qu’il n’y a que 4525 locations à l’année dans le parc privé.
Au 16 septembre 2021, on ne pouvait trouver que 28 offres de locations à l’année à Biarritz sur les agences ou plateformes Carmen Immobilier, Foncier, Foncia, Orpi, Square Habitat, Guy Hoquet, Century 21 ou Le Bon Coin, pour répondre aux centaines de demandes de la population locale. Par contre, le même jour, les mêmes agences proposaient 706 meublés touristiques libres !!!
Le phénomène s’aggrave depuis que les grandes villes comme Paris, Lyon, Bordeaux etc. ont pris des mesures efficaces comme la « compensation » pour stopper l’hémorragie du parc locatif à l’année causée par les plateformes de type Airbnb et Abritel . Ces dernières développent depuis une stratégie de redéploiement vers les petites villes du littoral et les territoires ruraux, avec campagne de publicité, démarchage commercial et implantation de « conciergeries », telles que Luckey, la conciergerie appartenant à Airbnb. Le Pays Basque est une des principales victimes de cette nouvelle stratégie