Zineb (le prénom a été changé) vit à Bayonne depuis plus de trente ans. De nationalité marocaine, elle est arrivée en France quand elle était enfant, en 1979, avec le regroupement familial pour rejoindre son père qui travaillait dans le bâtiment. Mère de deux enfants de nationalité française, disposant d’un casier judiciaire entièrement vierge, Zineb a déposé le 18/07/2017 une demande de naturalisation auprès des services de l’immigration et de l’intégration de la Préfecture de Gironde.

Une vraie gifle

Fin 2020, sans aucune nouvelle malgré ses relances successives, Zineb qui est adhérente à Alda demande conseil auprès de l’association. Nous sollicitons pour elle un rendez-vous auprès du défenseur des droits. Après plusieurs interventions de sa part, et plus de trois ans après le dépôt du dossier complet, son examen commence enfin. Zineb est convoquée à Bordeaux pour un entretien qui se déroule parfaitement.

Mais, le 22 avril 2021, elle reçoit comme une vraie gifle un courrier de refus de naturalisation. Reflet d’un durcissement des politiques migratoires de la France, cette décision est motivée par un seul fait : « en raison du caractère incomplet de votre insertion professionnelle (…) « En effet, l’examen de votre parcours professionnel, apprécié dans sa globalité depuis votre entrée en France, ne permet pas de considérer que vous avez réalisé pleinement votre insertion professionnelle puisque vous ne disposez pas de ressources suffisantes et stables ». Bref, Zineb ne gagne pas assez pour pouvoir prétendre à la nationalité française ! C’est le retour à un régime censitaire. En opposition totale aux idéaux républicains selon lesquels l’argent ne fait pas la citoyenneté.

Pourtant, Zineb travaille mais seulement à temps partiel car elle doit s’occuper de sa mère, veuve et malade, et d’un frère lourdement handicapé. Elle a donc des petits revenus mais qui lui suffisent pour vivre.

Un précédent inquiétant

Le découragement gagne Zineb, elle qui est parfaitement intégrée au Pays Basque et est bénévole pour de nombreuses associations et causes humanitaires ou culturelles. Alda l’encourage à ne pas accepter cette décision qui la prive de sa citoyenneté et des droits allant avec. Il s’agit aussi de ne pas accepter ce précédent inquiétant pour toutes les autres personnes voulant être naturalisées.

Le soutien s’organise alors, de manière collective. Alda aide Zineb à rédiger un recours gracieux adressé au Préfet. Une collecte solidaire est lancée, pour payer une avocate spécialisée à qui Alda demande de monter un recours hiérarchique auprès du ministère de l’intérieur pour contester la décision préfectorale. De nombreuses attestations sont écrites par des présidents d’association ou de MVC et divers élus qui peuvent témoigner de la parfaite intégration et de l’engagement citoyen de Zineb. Le maire de Bayonne écrit au Ministère de l’intérieur pour appuyer ce recours hiérarchique qui est officiellement déposé le 22 juin 2021.

Travail de plaidoyer

A la rentrée, ni Zineb ni son avocate n’ont de nouvelles des recours qu’ils soient gracieux ou hiérarchique. Après concertation avec elles, Alda rentre en contact avec le Préfet des Pyrénées-Atlantiques Eric Spitz. L’association explique longuement en quoi ce dossier est emblématique et le précédent que constituerait ce refus inacceptable. Alda est prête à dénoncer publiquement une telle injustice et à en passer par la mobilisation publique si nécessaire. Mais nous trouvons un préfet particulièrement à l’écoute sur ce dossier-là, qui semble entendre nos arguments et comprendre la situation. Il s’engage à faire le point sur ce dossier avec les autorités compétentes, tant au niveau préfectoral que gouvernemental. 

Heureux dénouement

Fin décembre 2021, l’avocate mandatée par Alda, Maître Selvinah Pater, dépose un recours auprès du tribunal administratif de Nantes, pour attaquer le refus de naturalisation. Mais début janvier 2022, le sous-directeur de l’accès à la nationalité française, rattaché au ministère de l’intérieur, informe Zineb qu’elle a acquis la nationalité française depuis le 31/12/2022, le refus ayant donc été annulé. 

Cet heureux dénouement souligne la nécessité de l’action et de l’organisation collective, dans une période où les choses deviennent de plus en plus dures et injustes pour les plus vulnérables d’entre nous !