Il y a celui qui veut retrouver son amie d’enfance, celle qui se demande si c’est normal que le chauffage ne soit pas encore allumé, ceux qui cherchent leur chat ou qui partagent un bon plan pour des légumes pas trop chers : tous les jours, les appels se succèdent sur les groupes Facebook d’habitants d’un même quartier ou d’un même village. Parce qu’on n’ose pas toujours aller frapper à la porte des voisins qu’on ne connaît pas quand on a besoin d’un coup de main, qu’on a un bon plan à faire connaître ou tout simplement envie de partager un moment, ces groupes Facebook permettent de recréer du lien, de la Soule à Bayonne en passant par le Pays Xarnegu.  

Entraide et solidarité 
Le Pays Xarnegu, c’est le point de départ du groupe créé par France il y a trois ans. Installée à Bardos depuis peu, la jeune femme a été prise de court par le premier confinement : comment, dans ces conditions, découvrir ce qui se passait dans son village ? Sur son groupe “Au Pays Xarnegu et Alentours” (2 800 membres), les membres échangent maintenant quotidiennement : bons plans des producteurs locaux, activités à faire en famille, demandes de coups de main, actualités culturelles du territoire… “Les mots d’ordre du groupe, ce sont l’entraide, le partage, et la bienveillance. Ici, tout le monde est là pour s’aider. Il y a eu de jolies histoires : des gens qui cherchaient du bois pour se chauffer qui en ont trouvé rapidement, ou ceux qui ont trouvé des coups de main pour leur déménagement.” explique France. 

Chercher ses amis d’enfance…et trouver une communauté 
Entraide et bienveillance, ce sont exactement les mêmes mots qu’utilise Florence, modératrice du groupe “Si tu étais de la ZUP à Bayonne”, créé en 2014 par son amie Isabelle et qui compte aujourd’hui 3 900 membres. À l’origine, Isabelle cherche à retrouver des gens qu’elle a connus lors de son enfance à la ZUP. Rapidement, le groupe est devenu bien plus que cela. “Le chat errant qui retrouve ses maîtres, le doudou perdu rendu à son petit propriétaire, un coup de main pour les papiers, de l’information sur le boulot colossal fait par les associations du quartier : ce groupe est un outil virtuel qu’on offre aux habitants de la ZUP. Quand certains ont des inquiétudes (pannes électriques, travaux,…), ils peuvent les partager. D’autres répondent, certains vivent la même situation ; ça rassure. On n’accepte pas de démarchage commercial sur le groupe, mais pendant le Covid on s’est rendues compte des problèmes des petits commerces de proximité. On en a parlé, pour leur survie. Tout cela crée une communauté, il y a une belle alchimie.”  résume Florence.  

Rompre l’isolement 
Qu’on vive dans un quartier HLM ou à la campagne, pas toujours facile de faire des nouvelles rencontres ou de savoir ce qui se passe autour de chez soi. Le groupe Facebook, c’est le complément de la gazette municipale ou du bouche-à-oreille. Il met en lien des gens qui ne se connaissent pas mais partagent le même espace. En permettant l’échange de bons plans, d’infos et de services, il y remet en place une certaine entraide et casse l’isolement. “Le groupe Facebook du pays Xarnegu a permis de faire de belles rencontres, des gens à qui on aurait peut-être jamais parlé mais avec qui, maintenant, on partage des choses, et avec une dimension intergénérationnelle.” décrit France. “ Personnellement, j’y ai retrouvé des amis de mon enfance. Il n’y a pas que ça : les gens reçoivent des infos sur ce qui se passe, ils sont moins isolés.” complète Florence. 

Du clic au monde réel
Une illusion, ce qui se passe sur internet ? France le dit, le numérique est une porte vers le monde réel. Grâce au groupe Facebook du pays Xarnegu, des initiatives bien concrètes ont vu le jour : l’ancien propriétaire de la boulangerie de Bardos s’était lancé dans l’anti-gaspi et proposait ses invendus à prix cassés en fin de journée, les producteurs du château d’Espiute se sont mis à faire des paniers de légumes et des poulets, et des groupes de trocs de vêtements pour enfants et de graines pour le jardin se sont créés. À la ZUP de Bayonne, le groupe tient à mettre en valeur les activités et tout l’engagement associatif qui se passent dans le quartier. Au Pays Xarnegu, une association de chair et d’os est même en train de voir le jour, pour poursuivre “en vrai” ce qui se passe sur le groupe, en proposant des cafés-rencontres pour les personnes isolées, des ateliers découvertes, et promouvoir les producteurs locaux. Pour Florence de la ZUP, même si la modération et l’animation de ces groupes demandent beaucoup de travail, c’est “une école de la vie sans barrière culturelle, de classe sociale, religieuse, politique. Juste de l’humain et du coeur.”