Elle n’a pas froid aux yeux ni la langue dans sa poche. Aujourd’hui locataire HLM à Bidart, Malika Merzouki est une bénévole active d’Alda. Une de celles qui reçoit les appels à l’aide dans les permanences de l’association et qui accompagne les familles en difficultés. Malika comprend d’autant mieux ces personnes qu’elle-même est passée par là, a connu ce qu’elles endurent, ce qu’elles ressentent.

Une vie forgée d’épreuves

Née à Oloron-Sainte-Marie d’un père kabyle et d’une mère catalane, elle a 14 ans quand elle perd sa mère. Elle est en seconde quand une voiture lancée à 110 km/h l’écrase contre une autre voiture : traumatisme crânien, multiples fractures et sa jambe gauche totalement broyée. Elle suivra sa scolarité à l’hôpital où elle subira une trentaine d’interventions en un an. Émancipée à 16 ans, elle doit interrompre cette scolarité avant le bac pour subvenir aux besoins de son petit frère. Commence alors une vie professionnelle aussi diverse qu’intense, où elle exercera mille métiers, de vendeuse en porte-à-porte à chef d’entreprise…

C’est en 2010 qu’elle atterrit au Pays Basque, après un divorce et avec un enfant de 12 ans, au quartier Fargeot de Saint Jean de Luz plus précisément. Hélas, en 2016, les souffrances qui ne l’ont pas quittées depuis l’accident montent d’un cran… il faut à nouveau opérer sinon c’est l’amputation. Mais l’intervention ne sera pas miraculeuse, loin s’en faut. Malika ne peut plus « fonctionner “ et la douleur s’installe, permanente.

Grève de la faim dans sa voiture

Malika devient officiellement invalide en 2018 et perçoit dès lors une petite pension de 860 euros. Elle et son enfant vivent depuis juin 2015 à Anglet, dans un T3 au loyer de 850 euros plus les charges. La baisse brutale de ses revenus a évidemment rendu cette situation insoutenable. Malika, qui a pour principe de n’avoir aucune dette ni impayé, commence alors à puiser dans ses économies.

Fin 2019, malgré ses relances incessantes, sa demande de logement social vieille de 3 ans reste sans réponse. Et ce malgré son handicap, qui devrait lui donner une certaine priorité. Pire, elle est mal reçue – dédain voire arrogance, elle se fait même engueuler – par les différents services et interlocuteurs.

Elle donne son préavis du logement. Et le dimanche 26 janvier 2020, Malika, 44 ans, se gare devant la mairie d’Anglet et entame une grève de la faim dans sa voiture. Dès le 1er jour, le maire d’Anglet vient à sa rencontre et lui propose un logement d’urgence. Malika refuse et continue son action. Le 5ème jour, Domofrance lui attribue un logement social à Bidart. Malika ne cesse sa grève de la faim qu’après avoir eu un document écrit l’attestant, au 6ème jour.

Ce n’est qu’un début…

Elle a gagné mais son combat continue. Car elle a reçu un nombre incalculable de témoignages. « Ce qui m’a motivée à poursuivre après la grève de la faim, c’est la façon dont les gens me disaient qu’ils étaient traités. Moi, j’ai eu la force de batailler jour et nuit, de me mettre en grève de la faim. Mais certains, qui sont au fond du seau, n’ont plus cette énergie là… »

Malika s’investit dans une association s’occupant des personnes en situation de handicap et y prend des responsabilités nationales. Elle suit différents dossiers sur le handicap, le logement, les assurances, les problèmes avec l’administration, etc.

Mais à partir de 2021, atteinte d’un cancer du sein, elle entame un nouveau combat. Après 2 ans de chimiothérapie et de nouvelles souffrances, la rémission de sa maladie va coïncider avec son entrée dans Alda, début 2023.

Bouée de secours

Malika y intègre sa commission « batailles du quotidien », qui gère chaque semaine plus de 320 dossiers de familles et personnes victimes de divers problèmes ou injustices.

Elle découvre alors Alda de l’intérieur : « C’est une très grosse machine mise en place en très peu de temps. J’ai été impressionnée par tous ces bénévoles, la rigueur de leur travail. Cet engagement sans contrepartie, c’est rare à ce point-là. » Malika rédige des courriers, des recours DALO, accompagne les personnes dans diverses démarches.

Malika est toujours frappée de la détresse des gens qui font appel à Alda comme un ultime recours : «On se sent comme une bouée de secours quand on tient les permanences d’Alda.» Animée par « la volonté de rendre impossible que cela dure » chère à l’Abbé Pierre, Malika continue le combat, aujourd’hui plus que jamais.

Interview minute
Ton chanteur préféré ? Georges Brassens
Le film préféré ? La vie est belle de Roberto Benigni
Spectacle qui t’a le plus marqué ? «Les hommes sont des femmes comme les autres», pièce de théâtre très drôle vue à Bordeaux
Un café-restau : Le Xurrasco à Bayonne
Un plat ? Jambon (de Bayonne) poêlé et œufs frits
Une plage ? Celle où je peux déplier ma serviette entièrement.
Une ballade ? La montée vers l’ermitage à Ainhoa, hors saison.

Photo : © Nomadak